30 mai 2011

Le jeu des differences pas importantes: les rues et les avenues

Je sais pas vous, mais moi, après toute une enfance passée en France, je me suis habitué à certains trucs vis-à-vis de la signification des mots. Par exemple, une “entrée” (en français dans le texte) désigne le plat qui précède le plat principal, et non pas le plat principal lui-même (les trois quarts des restaurants nord-américains s’entêtent à penser le contraire). Et une douche, c’est ce que tout le monde prend le matin pour être propre et sentir bon – c’est pas un truc pour se nettoyer le vagin.

Dans le même genre, quand on me parle de rues et d’avenues, je m’imagine des voies de circulation urbaines plus ou moins grosses… mais pas ici. Regardons rapidement une carte de Vancouver:

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Voilà, hop, c’est déjà n’importe quoi. Ils ont plein de petites avenues (une pour chaque pâté de maison) qui croisent une grosse rue. Ca devrait pas être l’inverse?

En fait, au Canada (ainsi que dans d’autres pays comme les Etats-Unis), la plupart des villes adoptent un système où les dénominations de “rue” et “avenue” sont données aux axes orientés dans un sens donné. Ainsi, à Manhattan, les rues sont orientées d’Est en Ouest, alors que les avenues sont orientées du Nord au Sud. A Vancouver, comme vous pouvez le constater, c’est l’inverse – les avenues sont orientées Est/Ouest et les rues Nord/Sud (vous vous rappellez qu’ici on a un système routier en grille, j’espère?). Il n’y a pas vraiment de standard, chaque ville fait ce qu’elle veut (et certaines ont un systeme encore complètement différent).

Là où ça devient le bordel, c’est que certaines de ces villes (et plus particulièrement Vancouver) se sont développées en l’espace de quelques décennies plutôt que quelques siècles. Les responsables de la planification urbaine n’ont pas toujours pris le temps de renommer les voies ou de prévoir de la place dans les numéros pour des futurs quartiers. Ainsi, vers Strathcona et Grandview-Woodlands, au Nord de la 1ère Avenue, toutes les rues sont, euh, des rues (c’était ça ou numéroter les avenues avec des nombres négatifs). Et le gros axe qui traverse le quartier s’appelle “Commercial Drive”, alors que le suffixe “Drive” est d’habitude réservé aux rues semi-privées qui vous amènent chez un particulier.

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Vous avez aussi d’autres subtilités comme les rues interrompues: si vous avez un obstacle, genre un parc, un lac ou je sais quoi, une rue peut se terminer en cul-de-sac, et reprendre de l’autre côté. Par exemple, ici, “Osler Street” (orientée Nord/Sud, donc… vous suivez un peu, oui?) s’arrête devant le Jardin Botanique de Van Dusen et continue vers Sud.

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C’est super pour trouver une addresse non? Et ça c’est sans compter les rares (mais bien réelles) occurences de rues et d’avenues portant le même nom.

Bref, prenez un GPS quand vous partez en vadrouille…

1 mai 2011

L’art d’attendre le bus: le retour

Si vous êtes un lecteur de longue date, vous vous rappellez peut-être que l’un de mes premiers chocs culturels en arrivant à Vancouver était la découverte qu’ici les gens font la queue pour attendre le bus. Genre une vraie queue, l’un derrière l’autre, et on monte chacun à son tour sans essayer de gruger. Aujourd’hui, pour vous montrer que ça peut prendre des proportions incroyables, je vous ai fait une petite vidéo:

17 janvier 2011

En 2011, tout le monde est gentil

Oui, bon, ça commence à faire un peu tard pour souhaiter une bonne année, mais on est encore en Janvier donc ça marche… et vous savez que pendant la saison de ski et de cadeaux, il faut pas trop compter sur moi. Enfin bref, bonne année à tout le monde!

Quelle est donc la bonne résolution de 2011? J’en sais rien, perso je prend pas de bonnes résolutions, mais si vous voulez amener un peu du Canada dans votre vie, vous pouvez décider de devenir plus gentil! “Gentil comment?”, allez-vous me demander… “Gentil comme un policier Canadien” que je vais vous répondre.

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Vous vous rappellez peut-être de cette anecdote d’il y 2 ans, où un policier, nous voyant picoler du vin rouge de manière totalement illégale sur la plage, vient nous voir pour nous dire “histoire que vous soyez au courant, ça, c’est illégal ici” et repart aussitôt. Eh bien je peux vous en raconter d’autres, des anecdotes… par exemple, un ami de Seattle qui, un peu fatigué par la route pour venir à Vancouver par le vol en avion pour Calgary, enchaine les bourdes routières les unes après les autres. Un policier l’arrête deux ou trois fois de suite, s’excusant à chaque fois: “excusez-moi, monsieur, mais vous semblez avoir grillé un feu rouge”. Ou “excusez-moi, monsieur, j’ai bien peur que vous ne vous soyez engagé dans une rue à sens unique”. Au final, le policier offre de l’excorter jusqu’à son hotel.

Un autre ami, qui se fait choper sans titre de transport à la sortie du Skytrain, donne un faux nom au policier qui décide ensuite d’appeller le central pour vérifier son identité, mentionnant que si tout est en ordre, il le laissera partir sans amende. Mon ami s’enterre dans un gouffre de corrections à deux balles (“euh, en fait, mes amis m’appellent John, mais mon vrai nom c’est Ernest”), et le policier, après un soupir et une deuxième vérification avec le central, le laisse partir avec un avertissement.

En parlant du métro, d’ailleurs, les controlleurs de Translink sont les plus gentils du monde. En France, les controlleurs ils sont pas cons, ils contrôlent à la sortie du train, pour choper les malins qui ont voyagé sans payer. J’ai même vu plusieurs fois des controlleurs postés derrière un tournant du couloir de sortie, pour ne pas que les gens dans le train les aperçoivent et décident de rester dans la rame jusqu’à la station suivante, mais avec des officiers habillés en civil au niveau du quai pour justement attraper les personnes ayant un comportement suspect, genre “je fais demi-tour au dernier moment”… mais ici non: ils contrôlent à l’entrée. A l’entrée! Et la moitié du temps, juste à côté des machines pour acheter les billets! Super intelligent, non?

De temps en temps, ils contrôlent à l’embarquement du train, loin derrière la ligne de validation du titre de transport, mais même là il est facile de s’en tirer. Par exemple, l’excuse du “oh mince, pardon, j’ai oublié de valider mon ticket, je vais aller le faire tout de suite” marche. Si si, j’ai testé pour vous, et quelques autres personnes m’ont dit que ça avait marché pour eux aussi. Trop gentils les controlleurs. Et c’est pas qu’ils sont stupides, hein… on voit clairement sur leur visage qu’ils ne vous croient pas, mais c’est juste que, ben, c’est la west coast, quoi. C’est pas grave… cool, gars. Relax. Pas de pression. Whatever.

Evidemment, les policiers et les controlleurs ne sont pas 100% gentils, faut pas pousser non plus. Le Canada c’est le pays des Bisounours, mais même chez les Bisounours y’a des méchants. Mais j’ai pour l’instant entendu énormément plus d’anecdotes du genre “ils sont soit super gentils, soit super cons… peut-être les deux” que des anecdotes du genre “CRS SS sales enculés de leur mère”… donc voilà, en 2011, répandez bonheur et joie autour de vous, soyez gentil comme un policier Canadien!

24 octobre 2009

Gros bateau

Pendant qu’on est sur le sujet, et pour faire un peu contraste avec les petits, voilà une photo des nouveaux ferrys construits en prévision des jeux olympiques. Ce sont des bateaux de classe “Super C”, et, dans la bonne tradition nord-américaine du “on est les meilleurs de notre catégorie, sachant que notre catégorie est tellement restrictive qu’on est presque les seuls dedans de toutes façons” (encore une façon de se la péter), ce sont les “plus gros traversiers à double embarquement du monde” (comprendre: on peut faire rentrer les véhicules par l’avant et l’arrière, et le navire est généralement symmétrique… ça évite au capitaine de devoir faire demi-tour, c’est moins compliqué).

Gros bateau

Voilà.

Mmh? Quoi? “Il va où le bateau”?

Ben il va dans ton cul.

Bon okay, il va vers Nanaimo, sur l’Île de Vancouver. Mais bon, c’est pas comme si c’était très intéressant tout ça.

4 septembre 2009

La ligne du Canada

Canada Line

Parmi les nombreux aménagements que nous amènent les iminents Jeux Olympiques d’Hiver on trouve Canada Line, une nouvelle ligne de métro qui relie le centre-ville de Vancouver à l’aéroport et à Richmond, en banlieue sud. Elle vient d’ouvrir mi-Août donc ça sent encore le neuf! Et pour une raison qui me dépasse, le premier jour, il y avait des files d’attente pour monter dans les rames! A croire qu’il y a rien de bien plus intéressant à faire en été…

Tout comme les deux autres lignes, les rames sont climatisées, automatiques et sans chauffeurs, et on peut facilement essayer de se suicider en sautant sur les voies depuis le quai (par contre le train arrive relativement lentement donc je ne garantis pas le succès de l’opération). Il y a quelques nouveautés, par contre: des indications en temps réel du traffic dans les stations, des rames conçues pour des voyageurs encombrés de nombreux baggages, une couverture réseau téléphonique sur l’intégralité de la ligne pour que les hommes d’affaires importants et les adolescentes énervantes puissent rester en communication avec leurs potes, et des aménagements pour les vélos à la fois dans les stations et dans les rames.

Si personellement je suis bien content de l’arrivée de cette nouvelle ligne, avec quelques stations qui me serviront bien, vous pouvez bien vous douter que sa construction ne s’est pas déroulée sans protestations…

Déjà, n’importe quel projet relatif de près ou de loin aux J.O. va attirer moultes détracteurs, et le discours d’origine du conseil municipal (“non non non, on vous assure, ça n’a rien à voir avec les jeux”) n’a sans doute pas arrangé les choses. C’est que TransLink, la compagnie de transports publics locale, avait dans ses plans deux autres extensions, la Evergreen Line (pour desservir le “TriCity Area” en banlieue est, maintenant prévue pour 2014), et une continuation de la Millenium Line le long de Broadway jusqu’à UBC (prévue d’ici 2020). Ces De nombreuses personnes pensent qu’il aurait été nettement plus productif de construire l’une de ces 2 lignes en premier, mais que la ligne en direction de l’aéroport a été mise en avant dans l’espoir de faire plaisir aux touristes pendant la période des jeux. D’autres pensent que des investissements dans le réseau de bus serait plus bénéfique. Certains ont accusé TransLink d’avoir manipulé les projections d’usagers pour justifier la construction de la ligne, ou d’avoir mis en place des partenariats louches entre fonds publics et privés.

Le segment de ligne le long de Cambie Street a été l’un des plus critiqués. Pendant la durée des travaux, les plaintes de la part des habitants et des commerçants ont été nombreuses. Des boutiques et restaurants ont mis la clé sous la porte en accusant les chantiers de construction d’avoir tari leur clientèle, et ce malgré des campagnes marketing menées par TransLink pour pousser les gens à soutenir leur quartier. Divers procès ont été lancés, quelques-uns s’achevant avec une victoire de la part des commerçants, et des larges sommes d’argent versées.

Et évidemment, les dépassements de coûts et l’impact de la ligne de métro sur les taxes locales ou les valeurs immobilières garantissent que la Canada Line sera le bouc émissaire de bien des maux, à tort ou a raison, pendant quelques années. Si j’ai le temps et le courage, je vous parlerai d’ailleurs de l’autre bonne source de critiques, à savoir le Village Olympique, qui déchaine d’ailleurs encore plus les passions.

En tous cas, moi je m’en fous, maintenant je peux aller chez Best Buy et Canadian Tire en métro et ça c’est cool.

MàJ: notez que la branche du métro qui va à l’aéroport écopera d’une surtaxe à partir, normalement, de Janvier prochain. L’augmentation tarifaire devrait permettre à la fois à TransLink de rembourser ses dettes plus rapidement, mais aussi de calmer les autres compagnies de transports (taxis, navettes, etc.) qui ne voient pas toute cette affaire d’un très bon oeil.

3 mars 2009

Le jeu des différences pas importantes: les carrefours

Et je parle pas des super-marchés, hein. Je parle des vrais carrefours, ceux auxquels vous risquez de mourrir dans d’atroces souffrances rien qu’en y mettant un pied dessus. Sauf qu’aujourd’hui on va parler du point de vue du conducteur.

En France, quand on s’arrête à un feu rouge, c’est simple: on avance, et quand on arrive devant le feu rouge, on s’arrête. On s’arrête au feu rouge, donc. Simple. Efficace.

Au Canada, c’est plus compliqué. Si vous essayez de vous arrêter au feu rouge, vous êtes dans la merde. Voyez plutôt:

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Si vous venez d’en bas à droite et que vous voulez continuer à travers le carrefour, il faut vous arrêter à la ligne rouge. Le point rouge sur le côté de la route, de l’autre côté du croisement, c’est l’endroit où se trouve le poteau pour le feu de circulation. Il y a en fait dans ce cas 3 feux (un pour chaque voie), qui pendouillent à quelques mètres du sol. Je vous ai entouré l’ombre de ces feux avec le cercle rouge.

Vous comprendrez donc que si vous voulez vous arrêter au feu rouge comme en France, vous vous arrêtez en fait au milieu du croisement, ce qui est assez moyennement recommandé par les départements de la sécurité routière des deux pays.

Un des avantages de ce système, toutefois, est de ne pas nécessiter de feu secondaire en bas du poteau pour la première voiture qui attend, comme c’est le cas en France. Ca fait toujours ça en moins à entretenir et à alimenter en énergie…

Les plus observateurs remarqueront également qu’en plus des 3 ombres des 3 feux, on peut voir l’ombre d’un panneau rectangulaire horizonal. Ce panneau est une idée grandiose: y figure en effet le nom de la rue que vous croisez à ce carrefour. Plus besoin de se repérer en essayant de trouver un panneau minuscule accroché quelque part au mur d’un bâtiment du coin!

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Et le premier qui me dit qu’on a qu’à acheter un GPS, je lui en colle une.

22 mars 2008

Du déplacement pédestre dans un système routier en grille

Dans un récent article, on a abordé le système routier en grille de Vancouver, ainsi que les avantages que ça apporte. Un avantage que je n’ai pas mentionné est la généricité d’un tel système en ce qui concerne les déplacements.

Par exemple, le déplacement suivant:

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…est équivalent au déplacement suivant:

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…si on considère que l’important, c’est le point de départ et le point d’arrivée.

Il s’agit alors de trouver, parmi les nombreuses possibilités de déplacement, laquelle sera la plus rapide.

Contexte et postulats

Comme je me déplace principalement à pied personellement, je ne vais parler que de piétons ici. Ensuite, comme on se déplace sur une grille, la distance est la même quelque soit la trajectoire (si on ne prend évidemment en compte que les trajectoires directes qui ne font pas de détour). Si on exclut les considérations telles que les variations de vitesse en fonction de la pente, le seul facteur réellement impactant dans le temps de trajet est le temps d’attente aux feux rouges.

J’ai écrit un petit programme permettant de simuler le trajet d’un pieton à travers une grille, duquel je tire les diagrammes et les chiffres que je donne dans la suite de cet article. Les hypothèses de départ sont les suivantes:

  • Du point de vue du piéton, les feux de circulation sont aléatoires. En vérité, ils sont plus ou moins synchronisés, mais comme cette synchronisation est faite pour les voitures, qui se déplacent de manière significativement plus rapide que les piétons, elle est totalement perdue pour une vitesse moyenne de marche. De plus, une différence de quelques pourcents dans la vitesse de marche amène une grande différence dans l’état des feux rencontrés pendant le trajet. Comme il s’agit ici de trouver un algorithme générique qui ne dépend ni du lieu géographique, ni du piéton, j’ai opté pour un modèle aléatoire de feux de circulation.
  • Le temps de feu vert et de feu rouge est de 30 secondes chacun. En bon français, on traverse en courant comme un sagouin au feu orange clignotant, donc je compte ça comme un feu vert.
  • La grille est uniforme, et chaque intersection est identique. En pratique, il y a sûrement quelques endroits dans votre quartier où la grille est « cassée » d’une manière ou d’une autre. Sur mon trajet journalier pour aller au bureau, par exemple, je sais qu’en longeant le B.C. Stadium, j’avancerai de 3 pâtés de maison sans rencontrer d’intersection, et donc garanti sans feu rouge. J’optimise donc mon trajet matinal en donnant un biais à mon algorithme de manière à passer par là si cela semble bénéfique.

Le but du jeu est, partant d’une intersection donnée, aller à une autre intersection donnée. Disons que cette destination est le croisement de la rue Latitude (qui est « horizontale », orientée d’est en ouest) et de la rue Longitude (qui est « verticale », orientée du nord au sud).

Quelques algorithmes simples

L’aglorithme le plus simple, voire le plus stupide, consiste à aller tout droit en partant de chez soi jusqu’à atteindre la rue Latitude, puis de remonter cette rue jusqu’à atteindre Longitude.

Un algorithme toujours simple, mais un peu plus malin, consiste à traverser systématiquement la rue du côté où on voit un feu vert. Une fois de l’autre côté, on continue sur sa trajectoire. Si on atteint l’une des deux rues terminales (Latitude ou Longitude), on se contente alors d’aller tout droit jusqu’à la destination. J’ai appellé cet algorithme « algorithme opportuniste ».

Pour mes tests, j’ai considéré 4 types de trajets: 5×5, 5×10, 10×10 et 10×20, où les deux chiffres correspondent au nombre de pâtés de maison à traverser respectivement vers l’est et vers le nord (on démarre donc « en bas à gauche » et on va « en haut à droite »). Ces 4 trajets sont simulés 100.000 fois pour chacun des algorithmes, et le temps d’attente total de chaque trajet est enregistré (le temps d’attente total d’un trajet étant la somme de toutes les attentes à tous les feux rouges rencontrés). Je n’ai pas été au delà de 10×20 car j’estime qu’une distance plus grande incitera à prendre son vélo ou les transports en commun, à moins qu’on soit en train de se balader, auquel cas on est pas pressé. Pour information, mon trajet pour aller au bureau est de 7×8.

On peut déjà constater que l’algorithme opportuniste est non seulement nettement plus efficace que l’algorithme stupide, mais aussi plus sûr.

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On constate également que l’algorithme opportuniste rencontre moins d’attente en moyenne pour un trajet 10×10 qu’un trajet 5×10, alors que c’est un trajet plus long. Mon interprétation est que comme 5×10 est un trajet plus « étroit », le piéton peut plus rapidement déboucher sur la rue Longitude, et se retrouver à devoir avancer bêtement tout droit, sans aucun autre choix que d’attendre à chaque feu rouge. Le trajet 10×10, par contre, est « large », et permet au piéton d’avoir plus de « marge de manoeuvre » pour tourner à droite ou à gauche en fonction des feux.

Un peu d’optimisation

On peut légèrement améliorer l’algorithme opportuniste, de manière simple. Lorsqu’on se retrouve à un coin sud-ouest d’un pâté de maison (juste après avoir traversé la rue, donc), plutôt que de continuer dans la direction qu’on suivait précédemment, on se dirigera dans la direction vers laquelle il nous reste le plus de chemin à parcourir. Ainsi, si on est est plus près, en nombre de pâtés de maison, de la rue Longitude que de la rue Latitude, on ira vers le nord. Sinon, on ira vers l’est. Cet algorithme est « l’opportuniste légèrement malin ».

Cette optimisation donne des résultats assez frappants:

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Un peu plus d’optimisation (enfin, une tentative)

J’ai ensuite écrit deux nouveaux algorithmes: « l’opportuniste malin », et le « sacrificiel ». Ces deux algorithmes ont pour but de corriger le problème que j’ai mentionné à propos des trajets « étroits », et de la situation peu désirable d’aboutir sur une rue terminale alors que l’autre rue terminale est à plusieurs pâtés de maison de là. Il s’agit donc de laisser plus de « marge de manoeuvre » au piéton en essayant d’atteindre les deux rues terminales le plus possible en même temps, même s’il faut sacrifier un peu de temps au milieu du trajet.

L’opportuniste malin reprend l’algorithme de l’opportuniste légèrement malin, mais y ajoute la variation suivante:

  • Si on se trouve plus proche d’une des deux rues terminales par rapport à l’autre (par exemple on est à 2 pâtés de maison de Longitude, et à 5 de Latitude), on peut ignorer un feu vert et préférer, si possible, tourner en restant sur le même bloc afin de se diriger vers la rue terminale la plus lointaine. Par exemple, si on est au coin nord-ouest d’un bloc et que le feu vert nous permettrait de traverser vers le nord, mais qu’on se trouve très proches de Latitude, on ne va pas traverser, et plutôt longer le bloc vers l’est afin de se rapprocher de Longitude.

L’algorithme sacrificiel, lui, va plus loin, acceptant de faire des sacrifices:

  • Si on se trouve vraiment très proche d’une des deux rues terminales, on veut absolument continuer vers la rue terminale la plus lointaine, même si cela veut dire qu’on se tape un feu rouge.
  • On n’accepte de se taper un feu rouge que si ce feu rouge est « bien mûr », à savoir qu’on ne l’a pas vu passer au rouge alors qu’on approchait. J’estime que si le feu dure 30 secondes, on peut raisonnablement savoir si un feu est rouge depuis au moins 20 secondes, car cela veut dire qu’il est rentré dans le champ de vision du piéton 30 mètres environ avant que celui-ci l’atteigne. Le piéton peut en plus s’aider du feu perpendiculaire, qui devrait clignoter en orange si le croisement va bientôt basculer de sens. J’ai utilisé 2 instances de cet algorithme: un qui accepte de se taper des feux rouges vieux d’au moins 20 secondes, et un qui accepte ceux vieux d’au moins 25 secondes (ce qui veut dire qu’on sacrifie, au plus, 10 et 5 secondes respectivement).
  • On n’accepte de se taper un feu rouge que si l’on est significativement plus proche d’une rue terminale que d’une autre. Les 2 instances de l’algorithme utilisent également 2 réglages différents pour cela: une qui accepte de sacrifier du temps si on est 3 fois plus loin d’une rue terminale que d’une autre, et une qui accepte lorsqu’on est 4 fois plus loin.
  • Les 2 instances sont nommées, dans les graphes ci-dessous, « Sacrifical 3/-10 » (3 fois plus loin, 10 secondes) et « Sacrificial 4/-5 » (4 fois plus loin, 5 secondes). Le premier algorithme est donc plus prompt à sacrifier du temps à un feu rouge que le deuxième.

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D’abord, on constate que l’opportuniste malin est en fait moins efficace que l’opportuniste légèrement malin. Je pense que c’est tout simplement parce qu’on fait l’erreur de troquer un « gain certain » (un feu vert) pour un « gain hypothétiquement plus grand » (ignorer le feu vert et aller à une autre intersection pour se rapprocher de la rue terminale la plus lointaine, mais s’exposer à la possibilité d’avoir un feu rouge mal placé). Cette erreur est un phénomène assez classique de psychologie humaine, et est bien souvent peu bénéfique, comme on peut le voir également dans des jeux comme « Deal Or No Deal« , connu pendant un temps dans l’hexagone sous le titre « A prendre ou a laisser« , alias « La Boiboite D’Arthur« .

L’algorithme sacrificiel, lui, permet de grapiller quelques secondes dans certains cas, notamment les cas où, justement, il y a peu de marge de manoeuvre dès le depart (trajets courts ou « étroits »), mais perd de son intérêt pour les voyages longs et « larges ». De plus, il est légèrement moins sûr que la plupart des autres algorithmes. N’oublions pas également que dans le monde réel l’évaluation de l’âge d’un feu rouge peut être gênée par divers phénomènes, tel que l’obstruction de la vue du piéton, par exemple, ce qui rend l’application de cet algorithme plus délicat.

Conclusion

Il me semble que l’algorithme opportuniste légèrement malin est le plus efficace, surtout si on le combine subtilement, ici et là, avec un peu d’algorithme sacrificiel, notamment quand on se retrouve à des distances trop inégales des deux rues terminales, et qu’on est relativement sûr de son évaluation de l’âge d’un feu rouge (la plupart du temps parce que le feu perpendiculaire clignote depuis plusieurs secondes). Enfin, lorsqu’on combine le tout avec une certaine connaissance du quartier, on peut faire des trajets sans aucun temps d’attente à aucun feu rouge dans la majorité des cas!

Si vous avez repéré des erreurs, ou que vous avez des suggestions, n’hésitez pas à poster un commentaire. Et pour ceux qui vont inévitablement me dire que c’est beaucoup s’embêter pour économiser 23 secondes par jour, je leur dis « crotte ». En plus, ces gens là ne sont sans doute pas ingénieurs, donc ils ne peuvent pas comprendre qu’être ingénieur c’est plus qu’une formation, un métier, une passion… c’est un véritable mode vie! La quête du savoir! La soif d’optimisation! La joie de gaspiller du temps et de l’argent à travailler sur des choses inutiles! Sans oublier la compulsion à acheter plein de gadgets hors de prix, et le plaisir de chauffer son appartement uniquement avec leur effet Joule! Rah la la, vous savez pas ce que vous ratez les gars.

Grillé

Vancouver, comme pratiquement toutes les villes d’amérique du nord, possède un système routier en grille. C’est ça les villes fondées après l’invention de l’équerre et du compas, et aussi après la découverte des problèmes de traffic routier… on se retrouve avec ça:

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…ce qui est quand même beaucoup moins fun que ça:

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Notez la différence dans le nombre de sens interdits!

Mais malgré le côté "mauvais joueur" du système routier en grille, il y a quand même quelques avantages pratiques…

L’avantage le plus évident, c’est que pratiquement chaque route est une route alternative pour se rendre où vous voulez. Une rue est trop encombrée à votre goût? Elle est bouchée par des travaux? Il suffit de prendre la parallèle, à droite ou à gauche! C’est particulièrement sympathique quand on est en vélo, et qu’on peut ainsi totalement éviter de rouler sur les grandes avenues, choisissant plutôt les parallèles qui traversent les quartiers résidentiels calmes.

Un autre avantage, c’est qu’il est virtuellement impossible de se perdre: il suffit d’aller tout droit jusqu’à atteindre sa rue de destination, et ensuite de descendre ou remonter cette rue jusqu’à être arrivé. Pour se perdre, il faudrait donc soit partir carrément dans l’autre sens, ou alors être tellement la tête dans le cul qu’on passe à côté de sa maison sans s’en rendre compte.

Et enfin, l’avantage, c’est qu’on peut chercher à optimiser ses trajets de manière générique! On va voir ça dans le prochain article…

9 novembre 2007

Bah on m’avait pas prévenue

Rien que pour régaler les lecteurs de ce blog1, j’ai vécu l’expérience traumatisante d’être piétonne dans les rues de Vancouver.

A première vue, comme ça, on se dit que Vancouver c’est le paradis des piétons: des trottoirs nets et dégagés de toute déjection canine, une pollution qui ne se fait pas sentir, très peu de coups de klaxon. Mais tout ça, c’est uniquement une conspiration des conducteurs et cyclistes vancouverois, visant à nous donner un faux sentiment de sécurité afin de mieux nous avoir dès qu’on a le malheur de mettre un pied sur le goudron!

La triste vérité, c’est qu’en moins d’un an, j’ai failli me faire écraser 4 fois, juste en bas de chez nous, et à chaque fois sur un passage piéton, alors que je passais au feu vert2.

Afin que nos futurs visiteurs soient prévenus et ne fassent pas les même erreurs que moi, voici donc un petit compte-rendu sur les techniques favorites de sélection automobile pratiquées par les conducteurs locaux. C’est que du vécu.

  1. Classique, mais marche à tous les coups: je brûle le feu alors qu’une pitéonne est engagée sur le passage piéton. Notez l’habile variante: je m’arrête, mais APRES l’intersection.
  2. Je suis un cycliste, il fait nuit, j’ai pas de lumière (oui mais je porte mes jolies bandes jaunes fluo qui SERAIENT réfléchissantes à proximité d’une source de lumière) – pourquoi est-ce que je m’arrêterais au feu, d’abord? Cf. méthode n°1. Variante: j’en profite pour engueuler la piétonne (!?)
  3. La préférée des conducteurs ici. Petite précision pour nos lecteurs français, d’abord: ici on a le droit de tourner à droite au feu rouge, après avoir vérifié que l’intersection était dégagée de tout conducteur, cycliste, ou piéton. Je tourne au feu rouge. Je skippe la partie écrite en tout petit. Variante: je suis un conducteur de bus – royal, je klaxonne pour prévenir les piétons engagés sur le passage que je vais tourner.

Bon, voilà, c’est la française refoulée en moi qui avait besoin de pousser un coup de gueule. Faut dire qu’avec la pluie, on se fait – en plus – arroser par les bus lorsqu’on marche trop près de la chaussée, ça met pas de bonne humeur le matin.

1Oui, bon, aussi parce que j’ai toujours pas repassé le permis, OK.

2 Plus précisément: blanc

11 septembre 2007

Le jeu des différences pas importantes: le bus

Bus pour UBC

Ici, il y a plein de vieux bus moches. Ils sont probablement moins renouvelés qu’en France à cause du manque de jeunes de banlieues énervés pour les brûler. Heureusement, avec les machins olympiques de dans 3 ans, on va avoir plein de nouveaux bus et plein de nouvelles lignes.

Enfin bref, l’une des différences pas importantes, c’est la façon de demander l’arrêt du bus. On tire une corde qui court le long des parois.

Corde d'appel

Dans les bus récents, il y a aussi des boutons comme on a l’habitude dans l’hexagone, mais la corde est quand même là.

A part ça, ils sont super radins en termes de plans. Pas de plan aux arrêts de bus. Pas de plan dans le bus. Rien. Il faut soit avoir foi en son destin, soit connaitre un minimum de géographie vancouveroise, soit, et c’est le plus courant, se renseigner auprès du chauffeur. Et Gloria Hosanna, à part quelques rares exceptions, j’ai toujours vu des chauffeurs sympathiques qui aident de manière fort professionnelle les passagers inquisiteurs.