Il est interdit en France, depuis belle lurette, de collecter des infos sur les origines ethniques ou raciales des gens lors des recensements nationaux. Difficile alors d’estimer à quel point la France est multi-culturelle, mais les instituts comme l’INSEE et l’INED fournissent des estimations qui placent le nombre de personnes nées à l’extérieur du territoire français autour de 13% de la population totale.

(non la photo n’a pas grand chose à voir mais il fallait bien mettre quelque chose pour vous attirer l’oeil… ça a marché?)
Le Canada, par contre, est un bon gros pays de droite qui a été fondé par des immigrants bourrus et qui n’a pas dans son histoire récente d’épisode sombre concernant un quelconque suivi d’une certaine minorité ethnique à des fins lugubres. Du coup, l’institut national de statistiques tient un compte précis des différentes origines ethniques, et on sait par le dernier recensement de 2006 qu’environ 21% des personnes vivant au Canada n’y sont pas nées.
Vu comme ça, on peut pas dire qu’il y ait un CRS qui pète 3 pattes à un canard sans papiers… mais la différence est dans l’évolution des chiffres: là où la diversité culturelle française est plutôt stable depuis quelques décennies, la diversité culturelle canadienne monte, surtout dans les grandes villes du pays. Pour vous donner une idée de la chose, à la louche, il y a 2 fois plus de nouveaux immigrés arrivant au Canada chaque année que pour la France, alors que la France a 2 fois plus d’habitants à la base. Ainsi, l’institut national de statistiques prévoit qu’en 2031 un tiers des canadiens serait membre de “minorités visibles” (un terme canadien controversé qui commence à être utilisé aussi en France), avec des chiffres grimpant jusqu’à 2 tiers pour les agglomérations urbaines de Toronto et Vancouver. Ce genre d’évolution démographique aura sans doute un impact très marqué sur la vie politique locale et nationale.
Y’en a qui vont me demander “Toronto et Vancouver? Pas Montréal?”. Ben non, apparemment, pas trop. Je me suis posé la question aussi, et j’ai été voir les statistiques démographiques pour les 3 villes, ainsi que pour le pays en général. Attention, les gars, il va y avoir des statistiques et des graphes et plein de trucs chiants comme je sais que vous aimez. Comme d’hab’, si je raconte une connerie, corrigez-moi dans les commentaires.
Langue Principale du Foyer
D’abord, j’ai regardé la répartition nationale de la langue principalement parlée dans les foyers:

On y voit que 89% des canadiens parlent français ou anglais chez eux.
A Toronto et Vancouver (respectivement), seulement 72% des gens parlent principalement anglais, avec le français perdu quelque part entre le roumain et le tagalog. Notez la présence asiatique plus marquée à Vancouver (avec un total de 12% rien que pour les différents dialectes chinois).


En comparaison, Montréal mélange beaucoup plus francophones et anglophones (70% et 17% respectivement), mais héberge moins de gens parlant une langue étrangère:

Pays de Naissance
Si on regarde la répartition de personnes nées au Canada par rapport à celles nées ailleurs, on retombe sur le chiffre national déjà mentionné de 79% contre 21%:

Toronto est la ville la plus cosmopolite, avec un impressionnant 47% d’immigrants, suivie par Vancouver avec 42%… de quoi donner des cauchemars à l’extrême droite française:


Montréal, par contre, reste pratiquement identique à la moyenne nationale avec 22% d’immigrés:

D’après quelques estimations trouvées ça et là sur internet, il semble que c’est légèrement supérieur au taux d’immigrés à Paris, par exemple.
Autres Chiffres
Si on regarde le nombre d’immigrés arrivés dans les 3 villes depuis les années 60, on peut voir que Toronto est la ville la plus attractive, probablement grâce aux nombreuses opportunités de travail qu’elle possède. Montréal et Vancouver ont des flux d’immigration similaires, mais il ne faut pas oublier que Montréal est 3 fois plus grande à la base.

Les chiffres générationels confirment que les Montréalais sont principalement des Canadiens de longue date comparés aux Torontonois ou Vancouvérois (les chiffres sont en pourcentages de la population totale de l’agglomération; “1ère génération” signifie immigré, “2ème génération” signifie enfant d’immigré):

Bref, tout ça semble bien indiquer que Montréal a proportionellement à Toronto ou Vancouver non seulement moins d’immigrés, mais également un moindre flux d’immigration. La réputation de Montréal comme ville super multi-culturelle en prend un coup, mais je suppose que cette réputation est surtout issue des festivals et évènements culturels qui s’y tiennent pendant l’été plutôt que de sa population (parce que bon, ici à Vancouver, par exemple, on a un sacré paquet de Chinois, mais c’est pas avec une parade à 2 ronds tous les ans et quelques restos sympas qu’on va donner des orgasmes aux touristes…).
Pourquoi je vous parle de tout ça, au fait? Eh bien parce que le Canada effectue un recensement de la population tous les 5 ans et que le prochain est… la semaine prochaine. Rien qu’à nous deux on va faire grimper le nombre de francophones dans le coin d’au moins, pfiou, 3 ou 4%!